La Haute Cour Constitutionnelle,

Vu la Constitution ;

Vu la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant du 20 novembre 1989 ;

Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;

Vu la loi n°2016-017 du 02 août 2016 modifiant et complétant certaines dispositions du Code de procédure pénale malagasy ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

EN LA FORME:
1. Considérant que par lettre n°55/PRM/SG/DEJ-16 du 20 juillet 2016, le Président de la République, conformément aux dispositions de l’article 117 de la Constitution, saisit la Haute Cour Constitutionnelle pour contrôle de constitutionnalité, préalablement à sa promulgation, de la loi n° 2016-018 relative aux mesures et à la procédure applicables aux enfants en conflit avec la loi;
2. Considérant que selon l’article 116.1 de la Constitution, la Haute Cour Constitutionnelle « statue sur la conformité à la Constitution des traités, des lois, des ordonnances et des règlements autonomes » ; que selon l’article 117 de la Loi fondamentale « avant leur promulgation, les lois organiques, les lois et les ordonnances sont soumises obligatoirement par le président de la République à la Haute Cour Constitutionnelle qui statue sur leur conformité à la Constitution » ;
3. Considérant que le Sénat et l’Assemblée Nationale ont adopté la loi n° 2016-018, lors de leurs séances respectives du 17 juin 2016 et du 30 juin 2016 ; qu’ainsi, la loi est soumise à un contrôle obligatoire de constitutionnalité ; que la saisine introduite par le Président de la République doit être déclarée recevable ;

AU FOND
4. Considérant, que la matière objet de la loi soumise au contrôle de constitutionnalité, a été élaborée pour protéger les enfants et plus particulièrement les enfants ayant commis des infractions et traduits en justice, appelés enfants en conflit avec la loi, conformément aux instruments internationaux que Madagascar a ratifiés ;
5. Que la Constitution de la Quatrième République prévoit en son article 137 alinéa 4 que « les traités et accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie »; que le rang des normes internationales dans la hiérarchie des normes est ainsi clairement défini par la Loi fondamentale ; qu’elles sont subordonnées à la Constitution, puisqu’elles ne peuvent produire d’effets juridiques si elles lui sont contraires ; qu’elles ont par contre une valeur supérieure à la loi, dès lors qu’elles ont été ratifiées ; que les dispositions législatives relatives aux enfants en conflit avec la loi doivent ainsi être mises en conformité avec l’instrument juridique international relative aux droits de l’enfant ;
6. Considérant que dans le préambule de sa Constitution, Madagascar fait siennes, « les conventions relatives aux droits de l’enfant » ; que l’article 4 de la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant dispose que « les Etats parties s’engagent à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires pour les droits reconnus dans la présente Convention » ;
7. Qu’il s’avère, ainsi, nécessaire d’actualiser et de reformer l’ordonnance n° 62-038 du 19 septembre 1962 relative à la protection de l’enfance ;
8. Considérant que la loi déférée comporte cinq (5) titres et traite des objectifs de la loi, de la procédure extra-judiciaire et du rôle des conciliateurs, de la procédure judiciaire ainsi que de la compétence des magistrats à tous les stades de la procédure y compris celui de l’enquête préliminaire; que « des mesures alternatives à la détention préventive ou à titre de peines alternatives à l’emprisonnement » sont étayés au niveau de la procédure judiciaire en vue de la protection et de la réinsertion sociale des enfants en conflit avec la loi ;
9. Considérant que l’article 85 alinéa premier de la loi déférée dispose que « la mesure de détention préventive d’un enfant est une mesure exceptionnelle » ; que l’alinéa 2 du même article fixe des critères objectifs devant guider les magistrats avant la prise de décision de placer un enfant en détention préventive ; qu’en tant que gardien des libertés publiques, le juge doit respecter strictement ces conditions imposées par la loi et garder le caractère « exceptionnel » de la détention préventive, qui est un principe fondamental reconnu par l’article 15 in fine de la Constitution qui dispose que « la détention préventive est une exception » ;

10- Considérant que la loi soumise au contrôle de constitutionnalité pose les principes directeurs en matière de convention internationale sur la protection des enfants en conflit avec la loi et ne contient aucune disposition contraire à la Constitution ;

En conséquence
Décide :

Article premier. – La loi n° 2016-018 relative aux mesures et à la procédure applicables aux enfants en conflit avec la loi est déclarée conforme à la Constitution.
Article 2– La présente décision sera notifiée au Président de la République, au Président de l’Assemblée Nationale, au Premier ministre, Chef du Gouvernement et publiée au journal officiel de la République.
Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo, le vendredi cinq août l’an deux mille seize à quatorze heures trente minutes, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :
Mr RAKOTOARISOA Jean-Eric, Président
Mme ANDRIANARISOA RAVELOARISOA Fara Alice, Haute Conseillère-Doyenne
Mme RAHARISON RANOROARIFIDY Yvonne Lala Herisoa, Haute Conseillère
Mr TSABOTO Jacques Adolphe, Haut Conseiller
Mr TIANDRAZANA Jaobe Hilton, Haut Conseiller
Mme RAMIANDRASOA Véronique Jocelyne Danielle, Haute Conseillère
Mr DAMA Andrianarisedo Retaf Arsène, Haut Conseiller
Mme RANDRIAMORASATA Maminirina Sahondra, Haute Conseillère
Mr ZAFIMIHARY Marcellin, Haut Conseiller
et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en chef.