La Haute Cour Constitutionnelle,
Vu la Constitution ;
Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;
Vu la loi organique n°2004-007 du 26 juillet 2004 sur les lois de finances ;
Vu le Code général des impôts ;
Vu le Code des douanes ;
Vu la Décision n°25 –HCC/D3 du 18 décembre 2017 concernant la loi n° 2017-024 portant loi de finances pour 2018 ;
Les rapporteurs ayant été entendus ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME
1. Considérant que la Haute Cour Constitutionnelle a été saisie le 06 Juillet 2018 par le Président de la République, suivant lettre n°087/PRM/SG/DEJ-18, conformément aux dispositions de l’article 117 de la Constitution, du texte de loi n° 2018- 024 portant Loi de Finances Rectificative pour 2018 ;
2. Considérant que selon l’article 116.1 de la Constitution, la Haute Cour Constitutionnelle « statue sur la conformité à la Constitution des traités, des lois, des ordonnances et des règlements autonomes » ; que selon l’article 117 de la Loi fondamentale « avant leur promulgation, les lois organiques, les lois et les ordonnances sont soumises obligatoirement par le président de la République à la Haute Cour Constitutionnelle qui statue sur leur conformité à la Constitution » ;
3. Considérant que l’Assemblée Nationale et le Sénat ont adopté la loi n° 2018-024 portant Loi de Finances Rectificative pour 2018, lors de leurs séances respectives en date du 29 Juin 2018 ; qu’ainsi, la loi est soumise à un contrôle obligatoire de constitutionnalité ; que la saisine introduite par le Président de la République doit être déclarée recevable ;
Sur la procédure législative
4. Considérant que l’article 87 de la Constitution dispose que « Les Lois organiques, les lois de finances et les lois ordinaires sont votées par le parlement » ; qu’il existe plusieurs types de loi de finances, qui font l’objet d’un vote du Parlement en tant qu’autorité budgétaire ; que la loi de finances rectificative modifie en cours d’année les dispositions de la loi de finances initiale ;
5. Considérant qu’aux termes de l’article 90.1° de la Constitution, « la loi de finances détermine les ressources et les charges de l’Etat dans les conditions et sous les réserves prévues par la loi organique » ; qu’à la différence de la procédure législative pour les lois ordinaires, la Constitution a fixé un délai d’examen pour les lois de finances ; qu’aux termes de l’article 92 de la Constitution, ce délai d’examen est de trente jours au maximum en première lecture pour l’Assemblée nationale et de quinze jours au maximum pour le Sénat ; qu’il est de cinq jours pour chacune des lectures suivantes ; que ces délais maximum fixés par la Loi fondamentale s’appliquent pour les lois de finances de l’année et aux lois de finances rectificatives ; que ces délais prescrits par la Constitution ont été observés par les deux chambres parlementaires ; qu’ainsi les règles de procédure législative ont été respectées ;
AU FOND
6. Considérant que le contrôle de constitutionnalité des lois de finances s’exerce en référence à la Constitution stricto sensu mais également à la loi organique n°2004-007 du 26 juillet 2004 sur les lois de finances, tel que prévu implicitement par l’article 90 de la Constitution ;
7. Considérant que selon l’article 2 alinéa 6 de la loi organique n°2004-007 sur les lois de finances, « seules des lois de finances dites rectificatives peuvent, en cours d’année, modifier les dispositions de la loi de finances de l’année. Sauf le cas de nécessité ou d’urgence, les lois de finances rectificatives doivent être déposées au cours du second semestre de chaque année » ;
8. Que la loi n° 2018- 024 portant Loi de Finances Rectificative pour 2018 a été déposée au cours du premier semestre de l’année, impliquant le cas de nécessité ou d’urgence ;
9. Considérant que les ajustements au cours du premier semestre 2018 ont des implications budgétaires importantes affectant l’équilibre budgétaire de la loi de finances initiale ; que la mise en œuvre opérationnelle du processus électoral suite à l’adoption des textes de lois organiques sur les élections, le renflouement de la caisse de retraite et des dépenses de soldes , l’octroi de suppléments de subventions à la JIRAMA, sont autant de facteurs qui justifient le cas de nécessité ou d’urgence pour la reprogrammation budgétaire tant au niveau de recettes que de dépenses et au cours du premier semestre 2018; que le dépôt de la loi n° 2018- 024 portant loi de finances rectificative pour 2018 au cours du premier semestre 2018 est conforme à la Constitution ;
10. Considérant que l’article 44 de la loi organique n°2004-007 du 26 juillet 2004 dispose que « sont joints à tout projet de loi de finances rectificative :
• Un rapport présentant les évolutions de la situation économique et budgétaire justifiant les dispositions qu’il comporte ;
• Une annexe contenant éventuellement les modifications de recettes et de dépenses concernant l’exercice budgétaire et l’équilibre qui en résulte » ; que ces documents sont annexés à la loi n°2018-024 portant loi de finances rectificative conformément aux dispositions de la loi organique susmentionnée;
11. Considérant qu’il n’appartient pas à la Haute Cour Constitutionnelle, qui ne dispose pas d’un pouvoir général d’appréciation et de même nature que celui du Parlement, de procéder éventuellement aux rectifications de la loi de finances rectificative ;
12. Considérant, toutefois, que sous réserve du respect des observations liées aux principes à valeur constitutionnelle, évoquées dans la décision n° 25 –HCC/D3 du 18 décembre concernant la loi n°2017-024 portant loi de finances « initiale » pour 2018 , les dispositions de la loi de finances rectificative déférée, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à la Constitution ;
EN CONSEQUENCE,
DECIDE :
Article premier.– Sous la réserve posée au Considérant 12 , les dispositions de la loi n°2018-024 portant Loi de Finances Rectificative pour 2018 sont conformes à la Constitution et peuvent faire l’objet d’une promulgation.
Article 2– La présente Décision sera notifiée au Président de la République, au Président du Sénat, au Président de l’Assemblée nationale, au Premier Ministre, Chef du Gouvernement et publiée au Journal officiel de la République.
Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo, le mercredi onze juillet l’an deux mil dix-huit à dix heures, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :
Monsieur RAKOTOARISOA Jean-Eric, Président ;
Madame ANDRIANARISOA RAVELOARISOA Fara Alice, Haute Conseillère-Doyenne ;
Monsieur TSABOTO Jacques Adolphe, Haut Conseiller ;
Monsieur TIANDRAZANA Jaobe Hilton, Haut Conseiller ;
Madame RAMIANDRASOA Véronique Jocelyne Danielle, Haute Conseillère ;
Monsieur DAMA Andrianarisedo Retaf Arsène, Haut Conseiller ;
Madame RANDRIAMORASATA Maminirina Sahondra, Haute Conseillère ;
Monsieur ZAFIMIHARY Marcellin, Haut Conseiller ;
Madame RABETOKOTANY Tahina, Haute Conseillère ;
et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en Chef.