LA HAUTE COUR CONSTITUTIONNELLE,
Vu la Constitution ;
Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;
Les rapporteurs ayant été entendus ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que par lettre n°009-PM/SGAG.09 en date du 15 mai 2009, le Premier Ministre, Chef du Gouvernement, conformément aux dispositions de l’article 115 de la Constitution, sollicite l’avis de la Haute Cour Constitutionnelle sur l’interprétation de l’article 56 de la Constitution et, plus particulièrement, de déterminer si « Un acte pris en vertu de cet article 56, de par les pouvoirs conférés par la Constitution au Président de la République, actuellement exercés par le Président de la Haute Autorité de la Transition, s’agit d’un acte de gouvernement faisant partie du pouvoir discrétionnaire du président, ou d’un acte d’une autre nature » ;
Considérant que l’article 115 de la loi fondamentale donne compétence à la Haute Juridiction à donner son avis sur une interprétation d’une disposition constitutionnelle ;
Considérant d’emblée que la qualification de la nature d’un acte pris par le pouvoir exécutif, ne relève pas de la compétence d’interprétation de la Haute Cour Constitutionnelle, au sens de l’article 115 de la Constitution, mais plutôt de celle de la juridiction chargée du contrôle de légalité ;
Considérant qu’aux termes de l’article 56 de la Constitution, « Le Président de la République accrédite et rappelle les Ambassadeurs et les envoyés extraordinaires de la République auprès des autres Etats et des Organisations Internationales.
Il reçoit les lettres de créance et de rappel des représentants des Etats et des Organisations Internationales reconnus parla République » ;
Considérant que l’article ci-dessus cité traite des actes du Président de la République concernant la conduite des relations diplomatiques de l’Etat ;
Considérant que ledit article prévoit deux catégories d’actes ;
Que le premier cas concerne la nomination et le rappel des Ambassadeurs et des envoyés extraordinaires auprès des autres Etats et des Organisations Internationales ;
Que le second cas est relatif à la réception et au rappel des représentants des Etats et des Organisations Internationales reconnus par la République de Madagascar ;
Considérant que le premier cas, relatif à la conduite des relations internationales de l’Etat, relève de la souveraineté étatique ; que les actes nommant les Ambassadeurs et les envoyés extraordinaires sont des actes unilatéraux relevant de la compétence discrétionnaire du Conseil des Ministres ;
Qu’en effet, pour lesdites personnalités, l’article 56 est indissociable de l’article 54-4° aux termes duquel « Le Président de la République nomme, en Conseil des Ministres, aux hauts emplois de l’Etat dont la liste est fixée par décret pris en Conseil des Ministres. Il peut déléguer ce pouvoir au Premier Ministre » ;
Que les Ambassadeurs figurent dans la liste édictée par le décret modifié n°76-132 du 31 mars 1976 portant réglementation des hauts emplois de l’Etat ;
Qu’il est de principe que de tels actes, relatifs aux hauts emplois de l’Etat, revêtent un caractère révocable, indépendamment de toute notion de faute ;
Considérant qu’en ce qui les concerne, les actes relatifs à la réception et au rappel des représentants des Etats et des Organisations Internationales reconnus par la République, sont des actes de haute politique régissant les rapports de l’Etat avec d’autres Etats et les Organisations Internationales ;
Que ces actes relèvent également du pouvoir discrétionnaire du Conseil des Ministres ;
En conséquence,
La Haute Cour Constitutionnelle émet l’avis que :
Article premier.- Les actes pris en vertu des articles 54-4° et 56 de la Constitution constituent des actes unilatéraux relevant du pouvoir discrétionnaire de l’exécutif.
Article 2.- La qualification de la nature des actes pris en vertu des dispositions des deux articles sus cités relève de la compétence de la juridiction chargée du contrôle de légalité.
Article 3.- Le présent avis sera publié au journal officiel.
Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo le mercredi vingt mai l’an deux mil neuf à dix heures, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :
M. RAJAONARIVONY Jean-Michel, Président
M. IMBOTY Raymond, Haut Conseiller – Doyen
Mme RAHALISON RAZOARIVELO Rachel Bakoly, Haut Conseiller
M. RABENDRAINY Ramanoelison, Haut Conseiller
M. ANDRIAMANANDRAIBE RAKOTOHARILALA Auguste, Haut Conseiller
Mme RASAMIMANANA RASOAZANAMANGA Rahelitine , Haut Conseiller
M. RABEHAJA-FILS Edmond, Haut Conseiller
M. RAKOTONDRABAO ANDRIANTSIHAFA Dieudonné, Haut Conseiller
Mme DAMA RANAMPY Marie Gisèle, Haut Conseiller
et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en chef.