La Haute Cour Constitutionnelle,

Vu la Constitution ;

Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;

Vu la loi organique n° 2004-007 du 26 juillet 2004 sur les lois de finances ;

Vu le Rapport de la Cour des comptes ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

EN LA FORME

  1. Considérant que la Haute Cour Constitutionnelle a été saisie par lettre n°068-021/PRM du 28 mai 2021 du Président de la République, conformément aux dispositions de l’article 117 de la Constitution, aux fins de contrôle de constitutionnalité de la loi n°2021-003 portant loi de règlement pour 2017 ;
  2. Considérant que selon l’article 116.1 de la Constitution, la Haute Cour constitutionnelle « statue sur la conformité à la Constitution des traités, des lois, des ordonnances et des règlements autonomes » ; que selon l’article 117 de la loi fondamentale « avant leur promulgation, les lois organiques, les lois et les ordonnances sont soumises obligatoirement par le président de la République à la Haute Cour Constitutionnelle qui statue sur leur conformité à la Constitution » ;
  3. Considérant que les lois de finances sont des lois ordinaires, mais qui sont adoptées selon une procédure spécifique et bien précise; qu’il existe plusieurs types de loi de finances, qui font l’objet d’un vote du Parlement ; que selon l’article 2 alinéa 7 de la loi organique n°2004-007, « la loi de règlement constate le montant définitif des recettes encaissées et des dépenses ordonnancées au cours de la gestion de l’année civile considérée et approuve les différences entre les résultats et les prévisions de la loi de finances de l’année, complétée, en tant que de besoin, par les lois rectificatives. Le cas échéant, elle approuve les dépassements de crédits résultant de circonstances de force majeure. Elle autorise enfin le transfert du résultat de l’année au compte permanent des résultats du Trésor»;
  4. Considérant qu’il résulte des dispositions sus-rappelées que ladite loi de règlement pour 2017 est soumise à un contrôle obligatoire de constitutionnalité; que la saisine régulière en la forme est recevable ;

AU FOND

  1. Considérant que l’article 42 de la loi organique n° 2004-007 du 26 juillet 2004 sur les lois de finances dispose que « les lois de finances présentent de façon sincère l’ensemble des ressources et des charges de l’Etat. Leur sincérité s’apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler » ; qu’il en résulte que le principe de sincérité n’a pas la même portée s’agissant des lois de règlement et des autres lois de finances ; que la sincérité de la loi de règlement s’entend de l’exactitude des comptes ;
  2. Considérant que lors de l’exécution budgétaire 2017, le Gouvernement a pris cinq (5) décrets d’avance d’un montant total de 7,17 milliards d’Ariary ; que si par essence, un décret d’avance peut être pris en urgence à la suite d’une calamité nationale ou d’une nécessité impérieuse d’intérêt national conformément aux dispositions de l’article 20 de la loi organique sur les lois de finances, il permet d’ouvrir des crédits supplémentaires sans affecter l’équilibre budgétaire ; que la sincérité des prévisions pourrait être mise en cause étant donné que lesdits décrets n’ont pas tous été adoptés à la suite d’une urgence impérieuse comme l’exige la loi ;
  3. Considérant qu’à la clôture de l’exercice 2017, certaines dépenses ont été engagées au-delà de la limite des crédits ouverts, ayant ainsi pour conséquence des dépassements des autorisations budgétaires ; que l’article 13 de la loi organique sur les lois de finances susmentionnée détermine d’une manière exhaustive les cas autorisés de ces dépassements ; que pour le cas d’espèce, le montant total s’élève à 320,30 milliards d’Ariary lequel est issu de paiement des dépenses relatives aux opérations d’investissement et de fonctionnement liées aux rémunérations de certains agents de l’Etat ;
  4. Qu’il serait nécessaire à l’avenir de bien évaluer les prévisions de dépenses afin d’éviter de nombreux crédits supplémentaires et des dépassements de dépenses de fonctionnement ;

Sur le contrôle parlementaire a posteriori de l’exécution budgétaire

  1. Considérant que conformément aux dispositions des articles 93 et 128 de la Constitution, le Parlement exerce le contrôle de l’exécution des lois de finances à travers le vote de la loi de règlement; ce contrôle permet aux parlementaires de contrôler l’exécution de la loi de finances initiale et des éventuelles lois de finances rectificatives ; qu’il s’agit, ainsi, de constater les résultats financiers de l’exercice écoulé, tant du point de vue des recettes que des dépenses ; qu’il appartient aux parlementaires de vérifier si les objectifs assignés à la loi de finances concernée ont été atteints ;

 

Sur la constatation des résultats de l’année 2017

  1. Considérant que selon les prescriptions légales, la loi de règlement est prise pour constater les résultats d’un exercice budgétaire ; que pour le cas d’espèce, le tableau ci-après présente les recettes et les dépenses de chaque cadre:
  RECETTES DEPENSES EXCEDENT/DEFICIT
Opérations du Budget Général    5 025 740 712 477,59        5 653 094 664 043,21 –          627 353 951 565,62
Opérations des Budgets Annexes          17 442 183 784,17             10 543 912 837,40                 6 898 270 946,77
Opérations des Comptes Particuliers du Trésor        358 919 676 043,33        1 080 875 822 165,48 –          721 956 146 122,15
Opérations génératrices de Fonds de Contrevaleur            5 097 212 022,22 0                 5 097 212 022,22
Opérations en Capital de la Dette Publique    1 743 108 445 179,13           556 748 968 298,72          1 186 359 476 880,41
Résultats de l’exercice budgétaire 2017 –          150 955 137 838,37

Source : LR 2017

Qu’ainsi les résultats à transférer au compte permanent du Trésor sont déficitaires de Ariary 150 955 137 838,37 pour l’exercice budgétaire 2017 ;

  1. Considérant que de tout ce qui précède, la loi n°2021-003 portant loi de règlement pour 2017 ne comporte aucune disposition contraire à la Constitution ;

EN CONSEQUENCE
D E C I D E :

Article premier.La saisine du Président de la République est déclarée régulière et recevable en la forme.

Article 2. – La loi n°2021-003 portant loi de règlement pour 2017 est conforme à la Constitution.

Article 3.– La présente Décision sera notifiée au Président de la République, au Premier Ministre, Chef du Gouvernement, à la Présidente de l’Assemblée Nationale, au Président du Sénat et publiée au journal officiel de la République.

Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo, le lundi sept juin l’an deux mille vingt-et-un à dix heures, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :

Monsieur Florent RAKOTOARISOA, Président

Monsieur NOELSON William, Haut Conseiller – Doyen,

Madame RATOVONELINJAFY RAZANOARISOA Germaine Bakoly, Haute Conseillère,

Madame RAKOTOBE ANDRIAMAROJAONA Vololoniriana Christiane, Haute Conseillère

Madame RAKOTONIAINA RAVEROHANITRAMBOLATIANIONY Antonia,

Haute Conseillère

Monsieur RASOLO Nandrasana Georges Merlin, Haut Conseiller

Madame RAZANADRAINIARISON RAHELIMANANTSOA Rondro Lucette,

Haute Conseillère

Madame ANDRIAMAHOLY RANAIVOSON Rojoniaina, Haute Conseillère

Et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en Chef.