La Haute Cour Constitutionnelle,
Vu la Constitution ;
Vu l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;
Vu la décision n° 11-HCC/D3 du 09 septembre 2023 arrêtant la liste définitive des candidats au premier tour de l’élection présidentielle du 09 novembre 2023 ;
Vu les avis n°07-HCC/AV du 7 septembre 2018 et 02-HCC/AV du 9 septembre 2023 ;
Vu la lettre en date du 08 septembre 2023 ayant pour objet la renonciation à l’exercice des fonctions de chef de l’Etat par intérim du Président du Sénat ;`
Vu la lettre n°105-PRM/SGP/DEJ/2023 en date du 09 septembre 2023 ayant pour objet la démission de Monsieur RAJOELINA Andry Nirina de ses fonctions de Président de la République ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur la constatation de la vacance de poste du Président de la République et sur la désignation du Chef de l’Etat par intérim
- Considérant que le Président de la Haute Cour Constitutionnelle a été saisi le 09 septembre 2023 par lettre n°105-PRM/SGP/DEJ/2023 du 9 septembre 2023 reçue et enregistrée au greffe de la Cour de céans le même jour de la démission du Président de la République Andry Nirina RAJOELINA libellée comme suit :
« En application des dispositions de l’article 46 alinéa 2 de la Constitution de la République de Madagascar et faisant suite à la validation de ma candidature par votre haute juridiction, j’ai l’honneur de vous adresser ma lettre de démission… » ;
- Considérant que selon l’article 52 de la Constitution, « par suite de démission, d’abandon du pouvoir sous quelque forme que ce soit, de décès, d’empêchement définitif ou de déchéance prononcée, la vacance de la Présidence de la République est constatée par la Haute Cour Constitutionnelle» ; qu’en conséquence, la Cour de céans constate la démission du Président de la République Andry Nirina RAJOELINA ;
- Considérant que l’article 46 alinéa 2 de la Constitution dispose que « dans ce cas, le Président du Sénat exerce les attributions présidentielles courantes jusqu’à l’investiture du nouveau Président» ; qu’en conséquence, le Président du Sénat assume la fonction de chef d’Etat par intérim ;
Sur la renonciation du Président du Sénat à l’exercice des fonctions de Chef de l’Etat par intérim
- Considérant que par lettre enregistrée au greffe de la Haute Cour Constitutionnelle le 08 septembre 2023, le Président du Sénat a demandé à la Haute Cour de constater sa volonté de renoncer à exercer les fonctions du Chef de l’Etat par intérim ; que pour des raisons personnelles, il ne pourra pas exercer pleinement les charges que la fonction de Chef de l’Etat exige ;
- Considérant que les alinéas 2 et 3 de l’article 52 de la Constitution prévoient que « dès la constatation de la vacance de la présidence, les fonctions du Chef de l’Etat sont exercées par le Président du Sénat. En cas d’empêchement du Président du Sénat constatée par la Haute Cour Constitutionnelle, les fonctions du Chef de l’Etat sont exercées collégialement par le Gouvernement » ;
- Considérant que le constituant n’a pas prévu un cas de renonciation ; qu’une renonciation est par définition un acte par lequel on renonce à un droit ; qu’il s’agit d’un acte volontaire émanant du bénéficiaire de droit ; que dans le cas d’espèce, la renonciation à exercer les fonctions du Chef de l’Etat pour des raisons personnelles laisse le poste de Chef de l’Etat vacant ; qu’il y a lieu de constater la vacance de poste ;
- Qu’en conséquence, en application de l’article 52 dernier alinéa de la Constitution et du fait de l’empêchement du Président du Sénat, les fonctions de Chef de l’Etat sont exercées collégialement par le Gouvernement ;
Sur le fonctionnement et de l’étendue des pouvoirs du Gouvernement exerçant collégialement les fonctions de Chef de l’Etat par interim:
- Considérant que le Premier Ministre en tant que chef du gouvernement est d’office le chef du Gouvernement collégial ; que la collégialité est fondée sur la règle de la prise de décision à la majorité des membres ; qu’en cas de partage de voix, la voix du Chef du gouvernement collégial est prépondérante ;
- Considérant que le Gouvernement exerçant collégialement les fonctions de Chef de l’Etat ne peut pas jouir de toutes les attributions dévolues au Président de la République élu pour la raison que les attributions présidentielles sont un dépôt de la souveraineté nationale au moyen ou par voie de l’élection ; que les pouvoirs du gouvernement collégial exerçant les fonctions de Chef d’État par intérim sont par conséquent circonscrites aux « attributions présidentielles courantes » tel qu’il ressort de la définition donné par l’avis n°07-HCC/AV du 07 septembre 2018 et de l’avis n°02-HCC/AV du 9 septembre 2023 sur l’interprétation, l’étendue et la portée de l’article 46 alinéa 2 de la Constitution; que le fonctionnement du pouvoir exécutif durant la période de l’intérim ne doit pas se traduire par une paralysie de l’État pouvant mettre en danger le fonctionnement régulier des institutions ;
- Considérant dès lors que le gouvernement collégial ne dispose pas des compétences attribuées au chef de l’État en vertu des articles 45 alinéa 3, 54 alinéa 1er et alinéa 2, 54 alinéa 3 et 55-4° sauf en cas de faute grave ou de crime commis par le membre du gouvernement ou le haut fonctionnaire, 5°, 6°, 7°, 8° ; 56 ; 57 alinéa premier ; 58 ; 59 alinéa 2 ; 60 ; 61 ; 103 ; 104 ; 107 ; 137 ; 162 ; 163 ; que le gouvernement collégial est habilité à exercer toutes les autres attributions confiées au Président de la République par la Constitution ;
- Considérant que le Premier Ministre continue d’exercer tous les pouvoirs ainsi que les attributions qui lui sont dévolues par la Constitution notamment en ses articles 65 et 66 et les textes en vigueur ;
EN CONSEQUENCE
DECIDE
Article premier.– La démission du Président de la République Andry Nirina RAJOELINA est constatée.
Article 2. La renonciation du Président du Sénat aux fonctions de chef d’Etat par intérim est constatée.
Article 3. Les fonctions de Chef d’Etat par intérim sont exercées par le gouvernement collégial.
Article 4. Le Premier Ministre, Chef du Gouvernement est le chef du gouvernement collégial.
Article 5. La prise de décision par le gouvernement collégial se fait à la majorité de ses membres.
Article 6. Le gouvernement collégial exerce les attributions présidentielles courantes définies par l’avis n°07-HCC/AV du 07 septembre 2018 et par l’avis n°02-HCC/AV du 9 septembre 2023.
Article 7. Les compétences attribuées au chef de l’État en vertu des articles 45 alinéa 3, 54 alinéa 1er et alinéa 2, 54 alinéa 3 et 55-4° sauf en cas de faute grave ou de crime commis par le membre du gouvernement ou le haut fonctionnaire, 5°, 6°, 7°, 8° ; 56 ; 57 alinéa premier ; 58 ; 59 alinéa 2 ; 60 ; 61 ; 103 ; 104 ; 107 ; 137 ; 162 ; 163 de la Constitution ne rentrent pas dans les compétences du gouvernement collégial. Il est habilité à exercer toutes les autres attributions confiées au Président de la République.
Article 8. La présente décision sera notifiée au Premier Ministre, Chef du Gouvernement, aux Ministres membres du Gouvernement collégial, à la Présidente de l’Assemblée Nationale, au Président du Sénat, à Monsieur RAJOELINA Andry Nirina et publiée au Journal officiel de la République.
Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo, le samedi neuf septembre l’an deux mille vingt-trois à vingt-deux heures, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :
Monsieur FLORENT Rakotoarisoa, Président
Monsieur NOELSON William, Haut Conseiller – Doyen
Madame RATOVONELINJAFY RAZANOARISOA Germaine Bakoly, Haut Conseiller
Madame RAKOTOBE ANDRIAMAROJAONA Vololoniriana Christiane, Haut Conseiller
Madame RAKOTONIAINA RAVEROHANITRAMBOLATIANIONY Antonia,Haut Conseiller
Monsieur MBALO Ranaivo Fidèle, Haut Conseiller
Monsieur RASOLO Nandrasana Georges Merlin, Haut Conseiller
Madame RAZANADRAINIARISON RAHELIMANANTSOA Rondro Lucette, Haut Conseiller
Madame ANDRIAMAHOLY RANAIVOSON Rojoniaina, Haut Conseiller ;
Et assistée de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en Chef.