La Haute Cour Constitutionnelle,
Vu la Constitution ;
Vu l’ordonnance n° 2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle ;
Vu le décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023 portant convocation d’une session extraordinaire du Sénat ;
Vu l’arrêté n°01/2021-SENAT/P modifiant et complétant l’arrêté n°001 Bis/2016-SENAT/P du 24 Février 2016 portant règlement intérieur du Sénat
Vu la requête des 38 députés déposée à la Haute Cour Constitutionnelle le 12 octobre 2023 ;
Vu les conclusions des parties du 16 Octobre 2023 et du 26 octobre 2023 ;
Vu les pièces produites au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
- Considérant que par requête en date du 12 octobre 2023 reçue et enregistrée le même jour au Greffe de la Haute Cour Constitutionnelle, les députés Randrianarisoa Stanislas (Antananarivo II) – Rabenirina Jean Jacques (Betioky Sud) – Djaosera Irénée (Analalava) – Ratsimbazafy Alain Jean (Atsimondrano) – Volahaingo Marie Thérèse (Bealanana) – Randrianantenaina Olivier Antonny José (Antsirabe II) – Jean François Michel (Antsirabe I) – Andriambelosoa Heriniaina (Avaradrano) – Rakotonirina Jimmy Joe (Iakora) – Ratsiraka Rolland (Toamasina I) – Voninahitsy Jean Eugène (Morafenobe) – Zafinandro Perle B.A. (Fort Dauphin) – Mohamad Ahmad (Fénérive Est) – Siteny Randrianasoloniaiko (Toliara I) – Razafimanantsoa Hanitriniaina (Tana I) – Johasy Raharisoa Eléonore (Vangaindrano) – Ralambomanana Fenoherintsoa (Tana III) – Rabenirina Maminiaina (Ambohidratrimo) – Rabekijana Solofo Hery (Amparafaravola) – Ramboasalama Emilien (Tana IV) – Mamihaja Charlot (Mananjary) – Ralambozafimbololona Fetra (Tana V) – Razara Pierre Fidèle (Ambatondrazaka) – Rakotoson Hubert (Mahanoro) – Andriamampandry Todisoa (Tana VI) – Randriambolaina Gerry (Avaradrano) – Edizard (Vohémar) – Rakotomanjato Rodin (Arivonimamo) – Rasidimanana (Manakara) – Razafintsiandraofa Jean Brunelle (Ikongo) – Masy Goulamaly Marie Jeanne d’Arc (Tsihombe) – Andriamiasasoa Doda (Manjakandriana) – Idealson (Ampanihy) – Rafidimanana Narson (Antanifotsy) – Andriamanjato Liantsoa Bina (Andramasina) – Rasolonjatovo Honoré (Faratsiho) – Rahasimanana Paul Bert (Tana IV) – Rakotonirina Augustin (Moramanga) saisissent la Cour de céans afin de régler le conflit de compétence se rapportant à l’article 46 alinéa 2 de la Constitution et constater l’incompétence du Gouvernement Collégial pour prendre le décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023, pour contrôler la constitutionnalité dudit décret portant convocation du Sénat en session extraordinaire, objet du conflit de compétence, déclarer que le décret est inconstitutionnel et ce quelle que soit sa nature, la convocation relevant plutôt du Président du Sénat ;
Des moyens et prétentions des parties
- Considérant que les requérants fondent leurs demandes en premier lieu sur l’article 116 alinéa 2 de la Constitution qui énonce : « outre les questions qui lui sont renvoyées par d’autres articles de la Constitution, la Haute Cour Constitutionnelle, dans les conditions fixées par une loi organique … règle les conflits de compétence entre deux ou plusieurs institutions de l’Etat ou entre l’Etat et une ou plusieurs Collectivités Territoriales Décentralisées ou entre deux Collectivités Territoriales Décentralisées… » ;
Qu’en second lieu, d’après l’article 46 alinéa 2 de la Constitution, « Le Président de la République en exercice qui se porte candidat aux élections présidentielles démissionne de son poste soixante jours avant la date du scrutin présidentiel. Dans ce cas, le Président du Sénat exerce les attributions présidentielles courantes jusqu’à l’investiture du nouveau Président » ;
Que n’ayant en aucun cas renoncé à ses fonctions de Président du Sénat, Monsieur Razafimahefa Herimanana était la seule autorité à disposer du pouvoir de prendre un décret portant convocation des assemblées à la date du 11 octobre 2023 ;
Que la prise du décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023 conduit actuellement à un conflit de compétence entre deux Institutions de l’Etat, en l’application de l’article 46 alinéa 2 de la Constitution qui confère les attributions Présidentielles courantes au Président du Sénat ; que le décret provient d’une Institution qui a usurpé les pouvoirs et doit être déclaré contraire à la Constitution ;
Qu’à titre subsidiaire, aux termes de l’article 84 : « Le Sénat se réunit de plein droit en deux sessions ordinaires par an. La durée de chaque session est fixée à soixante jours – La première session commence le premier mardi de mai et la seconde, consacrée principalement à l’adoption de la Loi de Finances, le troisième mardi d’octobre.
Il peut être également réuni en session spéciale sur convocation du Gouvernement. Son ordre du jour est alors limitativement fixé par le décret de convocation pris en Conseil des Ministres.
Lorsque l’Assemblée Nationale ne siège pas, le Sénat ne peut discuter que des questions dont le Gouvernement l’a saisi pour avis, à l’exclusion de tout projet législatif » ;
Qu’il est établi et incontesté que lorsque l’Assemblée Nationale ne siège pas, le Sénat n’intervient que dans le cadre de sa Compétence consultative ;
Que la manœuvre frauduleuse du Gouvernement Collégial pour violer manifestement la Constitution tient dans le fait qu’il occulte l’article 84 de la Constitution, et essaie de faire passer le décret de Convocation en question sous le régime des articles 76 et 85, alors que l’article 76 qui ouvre la possibilité d’une session extraordinaire ne doit en aucun cas être appliqué au niveau du Sénat, si l’Assemblée Nationale ne siège pas ;
Que la seule possibilité de convoquer le Sénat est prévue à l’article 84, non pas pour une session extraordinaire mais une session spéciale qui confère uniquement au Sénat le pouvoir de donner son avis sur des questions dont le Gouvernement le saisit ;
Que le Règlement Intérieur du Sénat énonce en son article 165 : « Le Sénat est consulté par le Gouvernement en session spéciale pour donner son avis sur les questions économiques, sociales et d’organisation territoriale. A cet effet, le Sénat se réunit sur convocation du Gouvernement par voie de décret. Les règles relatives à la tenue des séances et des débats de cette session spéciale sont régies par les règles des sessions. L’avis émis par le Sénat est transmis par le Président du Sénat au Premier Ministre », et en son Article 166 : « La durée et l’objet de l’ordre du jour de cette session spéciale sont fixés par le décret de convocation du Premier Ministre » ;
Que la loi organique n° 2015-007 du 3 mars 2015 fixant les règles relatives au fonctionnement du Sénat ainsi qu’aux modalités d’élection et de désignation des Sénateurs de Madagascar précise en son article 37 que : « Il peut également être réuni en session extraordinaire sur convocation du Gouvernement. Son ordre du jour est alors limitativement fixé par le décret de convocation pris en Conseil des Ministres.
La durée de la session extraordinaire ne peut excéder douze jours. Toutefois, un décret de clôture intervient dès que le Sénat a épuisé l’ordre du jour pour lequel il est convoqué.
Lorsque l’Assemblée Nationale ne siège pas, le Sénat ne peut discuter que des questions dont le Gouvernement l’a saisi pour avis à l’exclusion de tout projet législatif » ;
Qu’ainsi le décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023 portant convocation du Sénat en session extraordinaire est inconstitutionnel, violant l’article 46 alinéa 2 de la Constitution et les autres dispositions citées précédemment ;
- Considérant que la Direction de la Législation et du Contentieux en son mémoire en défense en date du 16 octobre 2023 soutient tout d’abord qu’en vertu de l’article 31 de l’ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 portant loi organique relative à la Haute Cour Constitutionnelle, la requête doit être déclarée nulle, les requérants n’ayant fait élection d’aucun domicile, une formalité exigée à peine de nullité ;
Qu’ensuite, elle fait valoir qu’aux termes de l’article 46 alinéa 2 de la Constitution « Le Président de la République en exercice qui se porte candidat aux élections Présidentielles démissionne de son poste soixante jours avant la date du scrutin présidentiel. Dans ce cas, le Président du Sénat exerce les attributions présidentielles courantes jusqu’à l’investiture du nouveau Président » ;
Qu’afin d’éviter toute vacance dans l’exercice du pouvoir qui ne peut pas exister dans un Etat démocratique, par un avis n°07-HCC/AV du 7 septembre 2018 relatif à une demande d’avis sur les attributions courantes du Président de la République par intérim, la Haute Cour Constitutionnelle a évoqué les dispositions de l’article 52 alinéas 1 et 2 de la Constitution selon lesquelles : « Par suite de démission, d’abandon de pouvoir, d’empêchement définitif ou déchéance prononcée, la vacance de la Présidence de la République est constatée par la Haute Cour Constitutionnelle »
Qu’à cet effet, l’article 52 alinéa 3 de la Constitution précise qu’ « en cas d’empêchement du Président du Sénat constatée par la Haute Cour Constitutionnelle, les fonctions de Chef de l’Etat sont exercées collégialement par le Gouvernement » ;
Que dans le cas d’espèce, suivant décision n° 12-HCC/D3 du 9 septembre 2023 la Haute Cour Constitutionnelle a constaté la vacance de la Présidence de la République suite à la lettre n°105-PRM/SGP/DEJ/ datée du même jour par laquelle le Président de la République Andry Nirina RAJOELINA a fait sa démission, la renonciation à l’exercice des fonctions du Chef de l’Etat par intérim du Président du Sénat RAZAFIMAHEFA Herimanana, suivant sa lettre enregistrée au Greffe de la Haute Cour Constitutionnelle le 08 septembre 2023, l’exercice des fonctions de Chef de l’Etat par intérim par le Gouvernement Collégial dont le Chef est le Premier Ministre, Chef du Gouvernement ;
Qu’il importe de souligner que la prise du décret n°2023-1390 du 11 octobre 2023 par le Gouvernement Collégial en Conseil des Ministres entre dans le cadre des attributions présidentielles courantes clairement circonscrites dans les avis n°07-HCC/AV du 07 septembre 2018 et n°02-HCC/AV du 09 septembre 2023 ;
Que les requérants ne sont pas fondés à affirmer que le Gouvernement Collégial a usurpé le pouvoir d’une autre Institution ;
- Considérant que la Direction de la Législation et du Contentieux soutient de plus que, certes l’article 84 de la Constitution dispose que lorsque l’Assemblée Nationale ne siège pas, le Sénat ne peut discuter que des questions dont le Gouvernement l’a saisi pour avis, à l’exclusion de tout projet législatif ; cependant le caractère consultatif de la saisine du Sénat en l’absence de session de l’Assemblée Nationale se limite au champ d’application de l’article 84, le Constituant ne l’ayant pas fait un principe général ;
Qu’à la lecture combinée des articles 76, 84, 85 de la Constitution, il apparaît clairement que le Constituant souhaitait faire la distinction entre sessions ordinaires et spéciales, lesquelles sont consultatives, et sessions extraordinaires, destinées à étudier un ordre du jour déterminé indépendamment des sessions de l’Assemblée Nationale ;
Que l’article 85 de la loi fondamentale prévoit clairement que « les dispositions des articles 71 à 79 sont applicables par analogie au Sénat et qu’aux termes de l’article 76 l’Assemblée Nationale est réunie en session extraordinaire sur un ordre du jour déterminé par décret du Président de la République en Conseil des Ministres, soit à l’initiative du Premier Ministre, soit à la demande de la majorité absolue des membres composant l’Assemblée Nationale » ;
Que par ailleurs, l’article 3 de l’Arrêté n°001-bis/2016/SENAT/TP du 24 février 2016 portant refonte de l’Arrêté n° 027/2008 du 6 mai 2008 sur le règlement intérieur du Sénat dispose que « Le Sénat se réunit en session extraordinaire dans les conditions fixées par l’article 76 de la Constitution » ;
Que dès lors, la compétence du Gouvernement Collégial à prendre le décret attaqué est conforme à la Constitution et la requête doit être rejetée ;
5.Considérant que dans leurs conclusions responsives du 26 octobre 2023, les requérants reprennent et confirment leurs précédents dires et tiennent à préciser qu’en tant que députés de Madagascar, ils élisent domicile au Palais de l’Assemblée Nationale à Tsimbazaza ;
En la forme
Sur la recevabilité de la saisine
Sur la recevabilité de la saisine pour contrôle de constitutionnalité du décret n°2023-1390 du 11 octobre 2023 portant convocation d’une session extraordinaire du Sénat
6.Considérant que le Gouvernement Collégial en Conseil des Ministres a convoqué le Sénat en session extraordinaire par le décret objet de la requête, à la demande de la majorité des membres composant la Chambre suivant lettre du 11 octobre 2023 adressée au Premier Ministre, Chef du Gouvernement Collégial ;
Qu’il y a lieu de rappeler que la décision n° 12-HCC/D3 du 09 septembre 2023 de la Haute Cour Constitutionnelle a déjà conféré au Gouvernement Collégial l’exercice des fonctions de chef d’Etat par intérim ;
7.Considérant que le décret attaqué est essentiellement rédigé en ces termes :
Article Premier : En application des dispositions des articles 76 et 85 de la Constitution, le Sénat est convoqué en session extraordinaire à compter du jeudi 12 octobre 2023 ;
Article 2 : La durée de la session extraordinaire ne peut excéder douze (12) jours ;
Article 3 : L’ordre du jour de la session extraordinaire concerne la réorganisation du Bureau Permanent du Sénat ;
8.Considérant qu’il est de jurisprudence que « le décret par lequel le Président de la République convoque, à la demande du Premier ministre ou de la majorité des membres de l’Assemblée nationale, le Parlement en session extraordinaire se rattache aux relations entre les pouvoirs publics constitutionnels ; qu’il n’est pas, dès lors, au nombre des actes dont il appartient au Conseil d’Etat, statuant au contentieux, de connaître » (C.E., 05 juillet 2007, 307069, recueil Lebon ) ; « Qu’il n’appartient pas au Conseil d’Etat statuant au contentieux de se prononcer sur la légalité des actes relatifs aux rapports entre le Premier ministre, le Président de la République et l’Assemblée Nationale » (C.E. 26 février 1992, Allain) ;
9.Considérant que le décret n°2023-1390 du 11 octobre 2023 a trait aux rapports publics constitutionnels, entre l’Exécutif et le Parlement en l’occurrence le Sénat, réglés dans des dispositions constitutionnelles, en l’espèce les articles 76 et 85 de la Loi Fondamentale ; qu’il est de jurisprudence constante de par sa nature que le décret attaqué revêt les caractères d’un acte de Gouvernement, dénomination appliquée à certains actes émanant des autorités exécutives qui jouissent d’une immunité juridictionnelle ; qu’elle est insusceptible de contrôle devant toutes les juridictions ;
Que de tout ce qui précède, la saisine aux fins de contrôle de constitutionalité du décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023 portant convocation d’une session extraordinaire du Sénat est irrecevable ;
Sur le conflit de compétence se rapportant à l’article 46 alinéa 2 de la Constitution et l’incompétence du Gouvernement Collégial pour prendre le décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023
10.Considérant que l’article 116-2° de la Constitution dispose que « Outre les questions qui lui sont renvoyées par d’autres articles de la Constitution, la Haute Cour Constitutionnelle, dans les conditions fixées par une loi organique : (…) règle les conflits de compétence entre deux ou plusieurs Institutions de l’Etat ou entre l’Etat et une ou plusieurs Collectivités Territoriales Décentralisées ou entre deux ou plusieurs Collectivités Territoriales Décentralisées » ; que l’article 118 ajoute que « Un Chef d’Institution ou le quart des membres composant l’une des Assemblées parlementaires ou les organes des Collectivités Territoriales Décentralisées ou le Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l’Etat de droit peuvent déférer à la Cour Constitutionnelle, pour contrôle de constitutionnalité, tout texte à valeur législative ou réglementaire ainsi que toutes matières relevant de sa compétence. » ;
Que la saisine de RAZAFIMANANTSOA Hanitriniaina et consorts (38 députés) aux fins de règlement de conflit de compétence et de constatation de l’incompétence du Gouvernement collégial à prendre le décret n°2023-1390 du 11 octobre 2023 est ainsi régulière et recevable ;
Au fond
En ce qui concerne le conflit de compétence se rapportant à l’article 46 alinéa 2 de la Constitution et l’incompétence du Gouvernement Collégial pour prendre le décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023
11.Considérant de prime abord qu’il faut distinguer la session extraordinaire de la session spéciale prévue par l’article 84 alinéa 3 de la Constitution pendant laquelle le Sénat a un rôle consultatif et ne peut être saisi que pour avis à l’exclusion de tout projet législatif ; que la convocation des deux assemblées parlementaires simultanément en session extraordinaire , obligatoire en matière de projet législatif, est justifiée par la nécessité de navette parlementaire dans le processus d’adoption de textes législatifs ;
Que l’article 76 de la Constitution dispose que « L’Assemblée Nationale est réunie en session extraordinaire, sur un ordre du jour déterminé, par décret du Président de la République pris en Conseil des Ministres, soit à l’initiative du Premier Ministre, soit à la demande de la majorité absolue des membres composant l’Assemblée Nationale. » ; que l’article 85 ajoute que « les dispositions des articles 71 à 79 sont applicables par analogie au Sénat » ;
12.Considérant que l’article 3 de l’arrêté n°01/2021-SENAT/P modifiant et complétant l’arrêté n°001 Bis/2016-SENAT/P du 24 Février 2016 portant règlement intérieur du Sénat énonce que « le Sénat se réunit en session extraordinaire dans les conditions fixées par l’article 76 de la Constitution » ;
13.Considérant que suivant décision numéro 12-HCC/D3 du 9 septembre 2023, les fonctions de chef de l’Etat par intérim ont été confiés au Gouvernement collégial suite à un empêchement du Président du Sénat pour « des raisons personnelles » ; que le Gouvernement assure collégialement les attributions présidentielles courantes entre autres la présidence du Conseil des Ministres seule autorité compétente pour prendre le décret de convocation du Sénat en session extraordinaire dans le cas où l’initiative de la tenue de la session émane de la majorité absolue des membres composant l’assemblée parlementaire conformément aux articles 55-1 , 76 et 85 de la Constitution;
14.Considérant que dans le cas d’espèce, suivant lettre en date du 11 octobre 2023, 14 Sénateurs ont saisi le Gouvernement collégial exerçant les fonctions de chef d’Etat par intérim dans le but de prendre un décret de convocation du Sénat en « session extraordinaire afin de procéder au renouvellement partiel du bureau permanent du Sénat » ;
15.Considérant par conséquent que, le décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023 portant convocation du Sénat en session extraordinaire pris en Conseil des Ministres, à la requête de 14 Sénateurs dont l’ordre du jour est « le renouvellement partiel du bureau permanent du Sénat » relève de la compétence liée du gouvernement collégial exerçant les fonctions de chef d’Etat par intérim en application des dispositions des articles 46 alinéa 2, 52, 55-1°, 76 et 85 de la Constitution ;
Que dès lors, aucun conflit de compétence entre des institutions de l’Etat n’est constaté par la Haute Cour de céans ;
EN CONSEQUENCE
DÉCIDE
Article Premier.- La saisine formulée par RAZAFIMANANTSOA Hanitriniaina et consorts (les trente-huit (38) députés) aux fins de contrôle de constitutionalité du décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023 portant convocation du Sénat en session extraordinaire est déclarée irrecevable.
Article 2.- La saisine formulée par RAZAFIMANANTSOA Hanitriniaina et consorts (les trente-huit (38) députés) aux fins de règlement de conflit de compétence et de constatation de l’incompétence du Gouvernement Collégial pour prendre le décret n° 2023-1390 du 11 octobre 2023 est régulière et recevable.
Article 3.- La Haute Cour Constitutionnelle ne relève aucun conflit de compétence entre le Gouvernement collégial et le Président du Sénat dans la convocation du Sénat en session extraordinaire.
Article 4.– Le Gouvernement collégial exerçant les fonctions de Chef de l’Etat par intérim est compétente pour prendre en Conseil des Ministres le décret de convocation du Sénat en session extraordinaire à la demande de 14 Sénateurs.
Article 5.- La présente décision sera notifiée au Gouvernement Collégial exerçant les fonctions de Chef de l’Etat par intérim, au Premier Ministre Chef du Gouvernement, à la Présidente de l’Assemblée Nationale, au Président du Sénat, à la Direction de la Législation et du Contentieux, aux requérants et publiée au journal officiel de la République.
Ainsi délibéré en audience privée tenue à Antananarivo le vendredi vingt-sept octobre l’an deux mille vingt-trois à dix heures, la Haute Cour Constitutionnelle étant composée de :
Monsieur FLORENT Rakotoarisoa, Président
Monsieur NOELSON William, Haut Conseiller – Doyen
Madame RATOVONELINJAFY RAZANOARISOA Germaine Bakoly, Haut Conseiller
Madame RAKOTOBE ANDRIAMAROJAONA Vololoniriana Christiane,Haut Conseiller
Madame RAKOTONIAINA RAVEROHANITRAMBOLATIANIONY Antonia,Haut Conseiller
Monsieur MBALO Ranaivo Fidèle, Haut Conseiller
Madame RAZANADRAINIARISON RAHELIMANANTSOA Rondro Lucette,Haut Conseiller
Madame ANDRIAMAHOLY RANAIVOSON Rojoniaina, Haut Conseiller
Et assisté de Maître RALISON Samuel Andriamorasoa, Greffier en Chef.